Le Conseil d’Etat apporte des précisions sur le régime du contentieux de l’aménagement commercial

Conseil d’État

N° 398077   
Publié au recueil Lebon
4ème – 5ème chambres réunies
M. Pierre-François Mourier, rapporteur
SCP PIWNICA, MOLINIE, avocats

lecture du vendredi 23 décembre 2016

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n° 15NC02351 du 17 mars 2016, enregistré le 21 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la cour administrative d’appel de Nancy, avant de statuer sur la requête de la société MDVP Distribution tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté du 15 juin 2015 par lequel le maire de Sedan a accordé un permis de construire à la société Lidl relatif à un supermarché de 1275 m2 à Sedan, a décidé, par application des dispositions de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d’Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :

1°) Le recours contentieux formé par un professionnel mentionné à l’article L. 752-17 du code du commerce (ci-après dénommé ” le concurrent “) contre un permis de construire visé à l’article L. 425-4 du code de l’urbanisme est-il soumis aux exigences des dispositions de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme alors que :

a) les conclusions en annulation et moyens de ce requérant contre ce permis ne sont recevables qu’en tant que ce permis tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale conformément aux dispositions de l’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme,

b) le requérant doit communiquer au demandeur son recours préalable devant la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) dirigé contre l’avis de la Commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) dans les cinq jours suivant sa présentation à cette commission à peine d’irrecevabilité du recours préalable en application des dispositions de l’article R. 752-32 du code du commerce ‘

2°) Le recours visé ci-dessus est-il soumis à des règles de délai dérogatoires par rapport à celles qui sont posées à l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme relatives à l’affichage sur le terrain du permis contesté compte tenu, notamment, de l’obligation de déposer un recours obligatoire à l’encontre de l’avis de la CDAC préalablement à l’exercice du recours contentieux dirigé contre le permis ‘

En cas de réponse positive, les délais de recours contre un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale courent-ils à compter de la notification de l’avis de la CNAC rendu sur ce recours préalable dans le délai de recours de droit commun ou d’une autre date ‘

3°) En cas d’avis favorable de la CDAC sur une demande d’autorisation d’exploitation commerciale présentée dans le cadre d’un projet de permis de construire, les dispositions de l’article L. 425-4 du code de l’urbanisme rapprochées, notamment, des dispositions des articles R. 425-15-1, R. 423-23, R. 423-25 (e), R. 423-36-1, R. 423-44-1, R. 424-2 (h) du même code et des articles L. 752-17, R. 752-19, R. 752-30, R. 752-31, R. 752-32, R. 752-34, R. 752-39 du code du commerce, imposent-elles à l’autorité administrative compétente d’attendre que la CNAC ait rendu son avis avant de statuer sur la demande de permis lorsqu’un recours préalable est exercé par un concurrent du pétitionnaire contre l’avis favorable de la CDAC ‘ En va-t-il de même si l’autorité administrative compétente n’est pas informée de l’existence de ce recours préalable exercé auprès de la CNAC ‘

4°) Si les dispositions de l’article L. 425-4 du code de l’urbanisme imposent à l’autorité administrative compétente d’attendre que la CNAC ait rendu son avis avant de statuer sur la demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale, la méconnaissance de ces dispositions invoquée dans le cadre d’un recours dirigé contre ce type de permis :

– conduit-elle à l’annulation totale du permis valant autorisation d’exploitation commerciale ou à ses seules dispositions portant autorisation d’exploitation commerciale, le concurrent ne pouvant quant à lui le contester que dans cette dernière mesure en application de l’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme, laissant alors le pétitionnaire libre d’exécuter le permis en tant qu’il vaut autorisation d’urbanisme (Comp. CE, 31 juillet 2015, commune de Telgruc-sur-Mer n° 380557 sur l’article L. 425-7 du code de l’urbanisme désormais abrogé par la loi du 18 juin 2014) ‘

– est-elle susceptible de faire l’objet d’une régularisation du permis entaché d’illégalité par la délivrance d’un permis modificatif (la modification pouvant notamment réduire la surface de vente à un niveau inférieur au seuil prévu à l’article L. 752-1 du code du commerce afin de dispenser le projet de la nécessité d’obtenir une autorisation d’exploitation commerciale) :

a) le cas échéant, préalablement à la décision du juge, dans le cadre d’une application adaptée de la jurisprudence du Conseil d’Etat (2 février 2004 SCI La Fontaine de Villiers n° 238315 ou 30 mars 2015 Société Eole Res n° 369431) ‘

b) sur le fondement des dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme ‘

La Commission nationale de l’aménagement commercial a présenté des observations, enregistrées le 7 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code de commerce ;
– le code de l’urbanisme ;
– la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ;
– le décret n° 2015-165 du 12 février 2015 ;
– le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;

Après avoir entendu en séance publique :

le rapport de M. Pierre-François Mourier, conseiller d’Etat,

les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

– La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Lidl ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 décembre 2016, présentée par la société MDVP Distribution ;

REND L’AVIS SUIVANT

Sur le cadre juridique applicable :

1. Les projets de création ou d’extension de surfaces de vente de magasins de commerce de détail mentionnés à l’article L.752-1 du code de commerce sont, en vertu de ce même article, soumis à une autorisation d’exploitation commerciale. Lorsqu’un permis de construire est nécessaire, la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a supprimé la décision spécifique par laquelle la commission départementale d’aménagement commercial ou, le cas échéant, la Commission nationale d’aménagement commercial, délivrait cette autorisation après avoir vérifié la conformité du projet aux critères énoncés à l’article L.752-6 du même code. Dans sa rédaction issue de cette loi, l’article L.425-4 du code de l’urbanisme dispose désormais que : ” Lorsque le projet est soumis à autorisation d’exploitation commerciale au sens de l’article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d’autorisation dès lors que la demande de permis a fait l’objet d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d’aménagement commercial “.

2. Il résulte de ces dispositions et de celles de l’article L. 752-17 du code de commerce, dans sa rédaction issue de cette même loi du 18 juin 2004, qu’un permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale en application des dispositions de l’article L.425-4 du code de l’urbanisme ne peut être légalement délivré que sur avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial compétente ou, le cas échéant, sur avis favorable de la Commission nationale d’aménagement commercial. A cette fin, les dispositions des articles R. 752-9 du code de commerce et R. 423-13-2 du code de l’urbanisme, issues des dispositions du décret du 12 février 2015 relatif à l’aménagement commercial, prévoient que la demande de permis de construire, déposée conformément aux dispositions des articles R. 423-2 et suivants du code de l’urbanisme, est transmise par l’autorité compétente en matière de permis de construire à la commission départementale d’aménagement commercial, qui procède à l’instruction de la demande d’autorisation d’exploitation commerciale.

3. La délivrance d’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale n’est alors possible que dans trois hypothèses. Premièrement, si l’avis de la commission départementale d’aménagement commercial est favorable à l’autorisation et ne fait l’objet, dans le délai d’un mois prévu à l’article L. 752-17 du code de commerce, ni d’un recours devant la Commission nationale d’aménagement commercial sur le fondement du I de cet article, ni d’une auto-saisine de celle-ci, sur le fondement de son V. Deuxièmement, si cet avis, favorable ou défavorable, fait l’objet, dans les mêmes conditions, d’un recours devant la commission nationale ou d’une auto-saisine de celle-ci et que la commission nationale rend un avis exprès favorable. Troisièmement, enfin, si l’avis de la commission départementale est favorable et qu’il est confirmé par le silence gardé par la commission nationale plus de quatre mois, soit sur un recours porté devant elle, soit à la suite de son auto-saisine. Il résulte des dispositions de ce même article L. 752-17 du code de commerce que, dans tous les cas où intervient un avis, exprès ou tacite, de la commission nationale, cet avis se substitue à l’avis de la commission départementale.

4. Enfin, la même loi du 18 juin 2014 prévoit que la décision unique par laquelle l’autorité compétente octroie un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, d’une part par les personnes mentionnées au I de l’article L. 752-17 du code de commerce, au nombre desquelles figurent notamment les professionnels dont l’activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour le projet, est susceptible d’être affectée par celui-ci et, d’autre part, par les personnes mentionnées à l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme, au nombre desquelles figurent notamment celles pour lesquelles la construction est de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elles détiennent ou occupent régulièrement. Pour chacune de ces deux catégories de requérants, l’article L. 600-1-4, introduit au code de l’urbanisme par la loi du 18 juin 2014, fixe des dispositions qui leur sont propres dans les termes suivants : ” Lorsqu’il est saisi par une personne mentionnée à l’article L. 752-17 du code de commerce d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l’article L. 425-4 du présent code, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l’annulation de ce permis qu’en tant qu’il tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu’il vaut autorisation de construire sont irrecevables à l’appui de telles conclusions. / Lorsqu’il est saisi par une personne mentionnée à l’article L. 600-1-2 d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l’article L. 425-4, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l’annulation de ce permis qu’en tant qu’il vaut autorisation de construire. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu’il tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale sont irrecevables à l’appui de telles conclusions “.

Sur la procédure administrative de délivrance d’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale :

5. Les questions soumises par la cour administrative d’appel de Nancy le sont à l’occasion d’un litige qui soulève certaines difficultés particulières, nées de ce qu’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale sur le fondement des dispositions de l’article L. 435-4 du code de l’urbanisme a été délivré avant que la Commission nationale de l’aménagement commercial, saisie d’un recours contre l’avis de la commission départementale compétente, ait rendu son propre avis.

6. Dans le cas où l’avis de la commission départementale d’aménagement commercial fait l’objet d’un recours devant la commission nationale, le troisième alinéa de l’article R. 752-32 du code de commerce prévoit que : ” (…) dans les sept jours francs suivant la réception du recours, le secrétariat de la commission nationale informe, par tout moyen, l’autorité compétente en matière de permis de construire du dépôt du recours “. Par ailleurs, le deuxième alinéa de l’article R. 752-42 du même code dispose qu’en cas d’auto-saisine de la commission nationale, son président notifie la décision de se saisir d’un projet ” (…) au préfet du département de la commune d’implantation, au demandeur et, si le projet nécessite un permis de construire, à l’autorité compétente en matière de permis de construire “. Ces dispositions ont pour effet d’organiser l’information de l’autorité compétente en matière de permis de construire, dans tous les cas où l’avis de la commission départementale compétente est porté devant la Commission nationale d’aménagement commercial.

7. Ainsi, en cas de recours introduit devant la Commission nationale d’aménagement commercial contre l’avis de la commission départementale compétente, ou en cas d’auto-saisine de la commission nationale, l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale, qui bénéficie d’un délai d’instruction prolongé de cinq mois en vertu des dispositions de l’article R. 423-36-1 du code de l’urbanisme, doit attendre l’intervention de l’avis, exprès ou tacite, de la commission nationale pour délivrer le permis. En effet, cet avis se substituant, ainsi qu’il a été dit, à l’avis de la commission départementale, le permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ne saurait légalement intervenir avant qu’il ait été rendu.

8. En revanche un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale délivré avant l’expiration des délais d’un mois prévus par les I et V de l’article L. 752-17 du code de commerce ne se trouverait pas entaché d’illégalité de ce seul fait. L’insécurité qui résulterait de ce que sa légalité pourrait être mise ultérieurement en cause à raison d’un avis négatif de la commission nationale, que celle-ci soit saisie d’un recours ou qu’elle s’autosaisisse, conduit toutefois à recommander à l’administration d’éviter de délivrer le permis avant l’expiration de ces délais.

Sur la procédure contentieuse contre un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale :

9. Les questions soumises par la cour administrative d’appel de Nancy qui sont relatives au recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale sur le fondement des dispositions de l’article L. 435-4 du code de l’urbanisme concernent les recours émanant des professionnels, mentionnés au I de l’article L.752-17 du code de commerce, dont l’activité est susceptible d’être affectée par le projet.

10. L’article R. 600-2 du code de l’urbanisme dispose que : ” Le délai de recours contentieux à l’encontre d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir court à l’égard des tiers à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l’article R. 424-15 “. Les professionnels mentionnés au I de l’article L. 752-17 du code de commerce sont des tiers au sens de ces dispositions. Ils bénéficient d’une information sur l’existence de la demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale en raison, notamment, de la publicité donnée à la décision de la commission départementale d’aménagement commercial en application des dispositions de l’article R. 752-30 du code de commerce. Ainsi, bien qu’ils ne soient pas nécessairement voisins du projet, le délai de recours contentieux à l’encontre du permis court à leur égard, comme pour tout permis de construire, à compter de la date prévue par les dispositions citées ci-dessus de l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme.

11. Pour les professionnels mentionnés au I de l’article L.752-17 du code de commerce, la saisine de la Commission nationale d’aménagement commercial est, en vertu du même article et des dispositions analogues de l’article L.425-4 du code de l’urbanisme, un préalable obligatoire à tout recours contentieux contre un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale. Eu égard au délai d’un mois dans lequel cette saisine doit intervenir, il sera exceptionnel qu’elle soit régulièrement introduite avant que le délai de recours contre le permis, déclenché ainsi qu’il a été dit au point précédent, soit expiré. Même alors, cette saisine n’aurait pas pour effet d’interrompre le délai de recours contentieux. En revanche, dans tous les cas où la Commission nationale d’aménagement commercial, régulièrement saisie, est amenée à rendre son avis après la délivrance du permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale, la publication de cet avis dans les conditions fixées à l’article R. 752-39 du code de commerce ouvre, à l’égard des requérants mentionnés au I de l’article L. 752-17 du code de commerce, y compris si le délai déclenché dans les conditions prévues par l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme est expiré, un délai de recours de deux mois contre le permis.

12. Enfin, aux termes du premier alinéa de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme : ” En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l’encontre (…) d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir, le préfet ou l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant (…) un permis de construire, d’aménager ou de démolir. L’auteur d’un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d’irrecevabilité du recours contentieux qu’il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif “. Ces dispositions s’appliquent, comme pour tout permis de construire, au recours formé par un professionnel mentionné au I de l’article L. 752-17 du code de commerce contre un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale.

Sur les effets d’une annulation contentieuse d’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale :

13. Il résulte des termes mêmes de l’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme cité au point 4 que les professionnels mentionnés au I de l’article L. 752-17 du code de commerce ne peuvent régulièrement saisir le juge administratif de conclusions tendant à l’annulation d’un permis valant autorisation d’exploitation commerciale qu’en tant que ce permis tient lieu d’une telle autorisation. Le juge administratif, dont la décision ne saurait excéder la portée des conclusions qui lui sont soumises, ne peut par suite annuler le permis de construire que dans cette seule mesure. Toutefois, le permis de construire ne pouvant être légalement délivré que si le pétitionnaire dispose d’une autorisation d’urbanisme commercial, son annulation en tant qu’il tient lieu d’autorisation d’urbanisme commercial fait obstacle à la réalisation du projet.

14. Dans un tel cas, néanmoins, si les modifications nécessaires pour mettre le projet en conformité avec la chose jugée par la décision d’annulation sont sans effet sur la conformité des travaux projetés aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l’article L. 421-6 du code de l’urbanisme, un nouveau permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale peut, à la demande du pétitionnaire, être délivré au seul vu d’un nouvel avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial compétente ou, le cas échéant, de la commission nationale.

16. Sont par ailleurs applicables, comme pour tout permis de construire, les règles qui gouvernent les pouvoirs et les devoirs du juge et notamment les dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme aux termes desquelles : ” Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire (…) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible d’être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations “.

Le présent avis sera notifié à la cour administrative d’appel de Nancy, à la société MDVP Distribution, à la société Lidl et au ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.

Il sera publié au Journal officiel de la République française.


Analyse

Abstrats : 14-02-01-05-03 COMMERCE, INDUSTRIE, INTERVENTION ÉCONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. RÉGLEMENTATION DES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES. ACTIVITÉS SOUMISES À RÉGLEMENTATION. AMÉNAGEMENT COMMERCIAL. RÈGLES DE FOND. – PERMIS DE CONSTRUIRE VALANT AUTORISATION D’EXPLOITATION COMMERCIALE (LOI N° 2014-626 DU 18 JUIN 2014) – 1) DÉLIVRANCE DU PERMIS APRÈS UN AVIS FAVORABLE DE LA CDAC – A) CAS OÙ LA CNAC EST DÉJÀ SAISIE – ILLÉGALITÉ – B) CAS OÙ LA CNAC N’EST PAS ENCORE SAISIE MAIS OÙ LE DÉLAI DE RECOURS N’EST PAS EXPIRÉ – LÉGALITÉ MAIS INSÉCURITÉ JURIDIQUE – 2) RÉGIME CONTENTIEUX – A) APPLICATION DE L’ARTICLE R. 600-2 DU C. URB. AUX RECOURS DES PROFESSIONNELS – EXISTENCE – B) APPLICATION DE L’ARTICLE R. 600-1 DU C. URB. – EXISTENCE – 3) EFFET D’UNE ANNULATION PARTIELLE D’UN TEL PERMIS – A) INTERDICTION DE RÉALISER LE PROJET – B) FACULTÉS DE RÉGULARISATION.
68-03-02 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. PERMIS DE CONSTRUIRE. PROCÉDURE D’ATTRIBUTION. – PERMIS DE CONSTRUIRE VALANT AUTORISATION D’EXPLOITATION COMMERCIALE (LOI N° 2014-626 DU 18 JUIN 2014) – DÉLIVRANCE DU PERMIS APRÈS UN AVIS FAVORABLE DE LA CDAC – 1) CAS OÙ LA CNAC EST DÉJÀ SAISIE – ILLÉGALITÉ – 2) CAS OÙ LA CNAC N’EST PAS ENCORE SAISIE MAIS OÙ LE DÉLAI DE RECOURS N’EST PAS EXPIRÉ – LÉGALITÉ MAIS INSÉCURITÉ JURIDIQUE.
68-06-01-03-01 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. INTRODUCTION DE L’INSTANCE. DÉLAIS DE RECOURS. POINT DE DÉPART DU DÉLAI. – PERMIS DE CONSTRUIRE VALANT AUTORISATION D’EXPLOITATION COMMERCIALE (LOI N° 2014-626 DU 18 JUIN 2014) – APPLICATION DE L’ARTICLE R. 600-2 DU C. URB. AUX RECOURS DES PROFESSIONNELS – EXISTENCE.
68-06-01-04 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. INTRODUCTION DE L’INSTANCE. OBLIGATION DE NOTIFICATION DU RECOURS. – PERMIS DE CONSTRUIRE VALANT AUTORISATION D’EXPLOITATION COMMERCIALE (LOI N° 2014-626 DU 18 JUIN 2014) – APPLICATION DE L’ARTICLE R. 600-1 DU C. URB. AUX RECOURS DES PROFESSIONNELS – EXISTENCE.
68-06-04 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. POUVOIRS DU JUGE. – PERMIS DE CONSTRUIRE VALANT AUTORISATION D’EXPLOITATION COMMERCIALE (LOI N° 2014-626 DU 18 JUIN 2014) – APPLICATION DE L’ARTICLE L. 600-5-1 DU C. URB. – EXISTENCE.
68-06-05 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. EFFETS DES ANNULATIONS. – PERMIS DE CONSTRUIRE VALANT AUTORISATION D’EXPLOITATION COMMERCIALE (LOI N° 2014-626 DU 18 JUIN 2014) – EFFET D’UNE ANNULATION PARTIELLE D’UN TEL PERMIS SUR RECOURS D’UN PROFESSIONNEL – 1) INTERDICTION DE RÉALISER LE PROJET – 2) FACULTÉS DE RÉGULARISATION.

Résumé : 14-02-01-05-03 Permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale (loi n° 2014-626 du 18 juin 2014)…. ,,1) Délivrance du permis. Cas où la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) a délivré un avis favorable :… ,,a) Lorsque la commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) a été saisie d’un recours contre cet avis ou s’est saisie elle-même, le permis ne peut légalement être délivré…. ,,b) En revanche, le permis n’est pas illégal s’il est délivré durant le délai de recours d’un mois contre l’avis de la CDAC ou d’autosaisine de la CNAC et qu’aucun recours n’a encore été formé ou que la CNAC ne s’est pas saisie elle-même…. ,,L’insécurité qui résulte de ce que la légalité d’un tel permis peut être mise ultérieurement en cause à raison d’un avis négatif de la commission nationale, qui se substitue à l’avis de la CDAC, conduit toutefois à recommander à l’administration d’éviter de délivrer le permis avant l’expiration de ces délais…. ,,2) Application du régime contentieux des permis de construire…. ,,a) L’article R. 600-2 du code de l’urbanisme, qui prévoit que le délai de recours court à l’égard des tiers à l’issue d’une période d’affichage sur le terrain, est applicable aux recours des professionnels mentionnés au I de l’article L. 752-17 du code de commerce. Ces tiers, bien qu’ils ne soient pas nécessairement voisins du projet, bénéficient d’une information sur l’existence de la demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale en raison, notamment, de la publicité donnée à la décision de la CDAC en application de l’article R. 752-30 du code de commerce…. ,,b) L’article R. 600-1 du code de l’urbanisme est applicable au recours d’un professionnel mentionné au I de l’article L. 752-17 du code de commerce contre un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale…. ,,3) Effets d’une annulation d’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale…. ,,a) Il résulte de l’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme que les professionnels mentionnés au I de l’article L. 752-17 du code de commerce ne peuvent saisir le juge administratif de conclusions tendant à l’annulation d’un tel permis qu’en tant qu’il tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale. Le juge administratif ne peut par suite annuler le permis que dans cette seule mesure. Toutefois, le permis de construire ne pouvant être légalement délivré que si le pétitionnaire dispose d’une autorisation d’urbanisme commercial, son annulation en tant qu’il tient lieu d’autorisation commerciale fait obstacle à la réalisation du projet…. ,,b) Dans un tel cas, néanmoins, si les modifications nécessaires pour mettre le projet en conformité avec la chose jugée par la décision d’annulation sont sans effet sur la conformité des travaux projetés aux dispositions mentionnées à l’article L. 421-6 du code de l’urbanisme, un nouveau permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale peut, à la demande du pétitionnaire, être délivré au seul vu d’un nouvel avis favorable de la CDAC ou, le cas échéant, de la CNAC. Sont par ailleurs applicables, comme pour tout permis de construire, les règles qui gouvernent les pouvoirs et devoirs du juge et notamment l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme qui permet de surseoir à statuer pour fixer un délai de régularisation par un permis modificatif.
68-03-02 Délivrance d’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale (loi n° 2014-626 du 18 juin 2014)…. …Cas où la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) a délivré un avis favorable :… ,,1) Lorsque la commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) a été saisie d’un recours contre cet avis ou s’est saisie elle-même, le permis ne peut légalement être délivré…. ,,2) En revanche, le permis n’est pas illégal s’il est délivré durant le délai de recours d’un mois contre l’avis de la CDAC ou d’autosaisine de la CNAC et qu’aucun recours n’a encore été formé ou que la CNAC ne s’est pas saisie elle-même…. ,,L’insécurité qui résulte de ce que la légalité d’un tel permis peut être mise ultérieurement en cause à raison d’un avis négatif de la commission nationale, qui se substitue à l’avis de la CDAC, conduit toutefois à recommander à l’administration d’éviter de délivrer le permis avant l’expiration de ces délais.
68-06-01-03-01 Application du régime contentieux des permis de construire aux permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale (loi n° 2014-626 du 18 juin 2014)…. ,,L’article R. 600-2 du code de l’urbanisme, qui prévoit que le délai de recours court à l’égard des tiers à l’issue d’une période d’affichage sur le terrain, est applicable aux recours des professionnels mentionnés au I de l’article L. 752-17 du code de commerce. Ces tiers, bien qu’ils ne soient pas nécessairement voisins du projet, bénéficient d’une information sur l’existence de la demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale en raison, notamment, de la publicité donnée à la décision de la CDAC en application de l’article R. 752-30 du code de commerce.
68-06-01-04 Application du régime contentieux des permis de construire aux permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale (loi n° 2014-626 du 18 juin 2014)…. ,,L’article R. 600-1 du code de l’urbanisme est applicable au recours d’un professionnel mentionné au I de l’article L. 752-17 du code de commerce contre un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale.
68-06-04 Application du régime contentieux des permis de construire aux permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale (loi n° 2014-626 du 18 juin 2014). Sont applicables, comme pour tout permis de construire, les règles qui gouvernent les pouvoirs et devoirs du juge et notamment l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme qui permet de surseoir à statuer pour fixer un délai de régularisation par un permis modificatif.
68-06-05 1) Il résulte de l’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme que les professionnels mentionnés au I de l’article L. 752-17 du code de commerce ne peuvent saisir le juge administratif de conclusions tendant à l’annulation d’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale qu’en tant qu’il tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale. Le juge administratif ne peut par suite annuler le permis que dans cette seule mesure. Toutefois, le permis de construire ne pouvant être légalement délivré que si le pétitionnaire dispose d’une autorisation d’urbanisme commercial, son annulation en tant qu’il tient lieu d’autorisation commerciale fait obstacle à la réalisation du projet.,,,2) Dans un tel cas, néanmoins, si les modifications nécessaires pour mettre le projet en conformité avec la chose jugée par la décision d’annulation sont sans effet sur la conformité des travaux projetés aux dispositions mentionnées à l’article L. 421-6 du code de l’urbanisme, un nouveau permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale peut, à la demande du pétitionnaire, être délivré au seul vu d’un nouvel avis favorable de la CDAC ou, le cas échéant, de la CNAC. Sont par ailleurs applicables, comme pour tout permis de construire, les règles qui gouvernent les pouvoirs et devoirs du juge et notamment l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme qui permet de surseoir à statuer pour fixer un délai de régularisation par un permis modificatif.

CNAC : une décision tacitement défavorable peut devenir quelques temps après expressément favorable !

Conseil d’État

N° 376359   
ECLI:FR:CESSR:2015:376359.20150921
Publié au recueil Lebon
4ème et 5ème sous-sections réunies
M. Laurent Huet, rapporteur
Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public
SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP VINCENT, OHL, avocats

lecture du lundi 21 septembre 2015

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu 1°, sous le n° 376359, la procédure suivante :

La société Lidl a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 9 juin 2010 du maire de la commune de Montmélian lui refusant un permis de construire, ainsi que la décision du 2 septembre 2010 née du silence gardé par le maire sur sa demande tendant à l’abrogation de cet arrêté. Par un jugement n° 1003895 du 21 mars 2013, le tribunal administratif a annulé la décision tacite du 2 septembre 2010 et rejeté le surplus de la demande dirigé contre l’arrêté du 9 juin 2010.

Par un arrêt n° 13LY01282 du 14 janvier 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a, sur appel de la commune de Montmélian et sur appel incident de la société Lidl, annulé ce jugement en tant qu’il statue sur la décision du 2 septembre 2010, rejeté l’appel incident de la société Lidl relatif à la décision du 9 juin 2010 et rejeté sa demande de première instance tendant à l’annulation de la décision du 2 septembre 2010.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 mars et 11 juin 2014 et 28 mai 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société Lidl demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel de la commune de Montmélian et de faire droit à son appel incident ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Montmélian la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu 2°, sous le n° 376360, la procédure suivante :

La société Lidl a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Montmélian a lui verser une somme de 70 416,46 euros en réparation des préjudices nés du refus opposé à sa demande de permis de construire. Par un jugement n° 1100992 du 21 mars 2013, le tribunal administratif a condamné la commune de Montmélian à lui verser une somme de 23 784, 50 euros.

Par un arrêt n° 13LY01281 du 14 janvier 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a, sur appel de la commune de Montmélian annulé ce jugement et rejeté la demande indemnitaire de la société Lidl ainsi que son appel incident.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat les 14 mars et 11 juin 2014 et 28 mai 2015, la société Lidl demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel de la commune de Montmélian et de faire droit à son appel incident ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Montmélian la somme de 5 000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

…………………………………………………………………………

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
– le code de commerce ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Laurent Huet, maître des requêtes en service extraordinaire,

– les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Lidl et à la SCP Vincent, Ohl, avocat de la commune de Montmélian ;

1. Considérant que les pourvois de la société Lidl présentent à juger des questions semblables ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 752-4 du code de commerce : ” Dans les communes de moins de 20 000 habitants, le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’urbanisme peut, lorsqu’il est saisi d’une demande de permis de construire un équipement commercial dont la surface est comprise entre 300 et 1 000 mètres carrés, proposer au conseil municipal ou à l’organe délibérant de cet établissement de saisir la commission départementale d’aménagement commercial afin qu’elle statue sur la conformité du projet aux critères énoncés à l’article L. 752-6. / (…) / En cas d’avis défavorable de la commission départementale d’aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d’aménagement commercial, le permis de construire ne peut être délivré. / La commission départementale d’aménagement commercial se prononce dans un délai d’un mois. / En cas d’avis négatif, le promoteur peut saisir la Commission nationale d’aménagement commercial qui se prononce dans un délai d’un mois. Le silence de la commission nationale vaut confirmation de l’avis de la commission départementale ” ;

3. Considérant qu’il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que la société Lidl a sollicité un permis de construire pour un supermarché de 901 m² dans la commune de Montmélian ; qu’en application des dispositions de l’article L. 752-4 du code de commerce citées ci-dessus, la commission départementale d’aménagement commercial de la Savoie a été saisie pour avis et a rendu, le 8 février 2010, un avis défavorable au projet ; que sur le fondement des mêmes dispositions, la société Lidl a, le 2 mars 2010, saisi la Commission nationale d’aménagement commercial qui s’est prononcée favorablement au projet par un avis du 12 mai 2010 ; que le maire de Montmélian s’est toutefois estimé tenu, le 9 juin 2010, de refuser le permis de construire sollicité ; qu’il a également rejeté le recours gracieux de la société Lidl contre ce refus et refusé de faire droit à la demande d’indemnité présentée par la société en réparation du préjudice qu’elle estimait avoir subi du fait de ces refus ; que cette société fait appel des deux arrêts du 14 janvier 2014 par lesquels la cour administrative d’appel de Lyon a, après avoir annulé deux jugements du tribunal administratif de Grenoble du 21 mars 2013, rejeté ses demandes de première instance tendant, d’une part, à l’annulation des refus opposés par le maire de Montmélian et, d’autre part, à la condamnation de la commune de Montmélian à la réparation de son préjudice ;

4. Considérant que si, en application des dispositions citées ci-dessus de l’article L. 752-4 du code de commerce, le silence gardé par la Commission nationale d’aménagement commercial sur sa saisine par la société Lidl le 2 mars 2010 a fait naître, le 2 avril 2010, un avis tacite confirmant l’avis négatif rendu le 8 février précédent par la commission départementale d’aménagement commercial, l’intervention de cet avis tacite ne faisait pas obstacle à ce que, se prononçant expressément sur ce projet le 12 mai 2010, la commission nationale émette un avis favorable se substituant à l’avis tacite précédemment rendu ;

5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en jugeant que les dispositions de l’article L. 752-4 du code de commerce faisaient obstacle à ce que la Commission nationale d’aménagement commercial se prononce sur le projet après l’expiration du délai d’un mois prévu par cet article et en en déduisant, par suite, que l’avis de cette commission devait être regardé comme confirmant implicitement l’avis défavorable de la commission départementale de sorte que le maire de Montmélian était, d’une part, tenu de refuser le permis de construire sollicité et, d’autre part, fondé à rejeter la demande indemnitaire de la société Lidl, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit ; que la société requérante est dès lors fondée à demander l’annulation des arrêts qu’elle attaque ;

6. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Lidl, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu’il y a lieu, au titre des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la commune de Montmélian le versement d’une somme de 3 000 euros à la société Lidl ;

D E C I D E :
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Article 1er : Les arrêts n° 13LY01282 et n° 13LY01281 du 14 janvier 2014 de la cour administrative d’appel de Lyon sont annulés.
Article 2 : Les affaires sont renvoyées devant la cour administrative d’appel de Lyon.
Article 3 : La commune de Montmélian versera une somme de 3 000 euros à la société Lidl au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Montmélian présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Lidl et à la commune de Montmélian.
Copie en sera adressée à la Commission nationale d’aménagement commercial.

Motivation de la décision de la CNAC – temps de desserte – zone de chalandise – progression démographique

Conseil d’Etat 25 juin 2008- UNION DES COMMERCANTS ET ARTISANS DE BOOS

Confirmation de la légalité d’une décision du 11 juillet 2006 par laquelle la CNEC a accordé à la société « Gesthie » l’autorisation de créer un hypermarché de 2 500 m² de surface de vente à l’enseigne « SUPER U », à Franqueville-Saint-Pierre (Seine-Maritime)

Le moyen tiré de ce que les avis des ministres intéressés n’auraient pas été communiqués à la commission nationale d’équipement commercial manque en fait.

Si, eu égard à la nature, à la composition et aux attributions de la commission nationale d’équipement commercial, les décisions qu’elle prend doivent être motivées, cette obligation n’implique pas que la commission doive chiffrer les dépassements éventuels des densités commerciales pour apprécier l’importance du déséquilibre entre les différentes formes de commerce que le projet est susceptible de créer, ni qu’elle soit tenue de prendre parti explicitement sur le respect par le projet qui lui est soumis de chacun des objectifs et critères d’appréciation fixés par les dispositions législatives applicables. En motivant sa décision en se référant notamment à la progression démographique de la zone de chalandise, à l’insertion du projet dans un pôle de développement urbain et à ses conséquences sur la stimulation de la concurrence entre enseignes de la grande distribution, la commission nationale a satisfait, en l’espèce, à cette obligation.

Il ressort des pièces du dossier qu’à l’appui de sa demande d’autorisation d’exploitation commerciale relative à l’implantation d’un supermarché de 2 500 m² à Franqueville-Saint-Pierre, la société Gesthie a défini une zone de chalandise correspondant à un temps de desserte de 15 minutes environ, comprenant trente neuf communes. Eu égard aux caractéristiques de cette zone urbaine et de l’équipement commercial, l’exclusion de certaines communes situées en périphérie de la zone de chalandise, notamment au delà de la RN 31, n’entache pas, en l’espèce, d’irrégularité la délimitation de cette zone, alors qu’au demeurant le dossier de présentation comporte un descriptif des équipements commerciaux existant dans ces communes.

Eu égard à la densité de grandes et moyennes surfaces existantes ou autorisées dans la zone de chalandise, supérieures à la moyenne nationale, le projet litigieux est susceptible d’affecter l’équilibre entre les différentes formes de commerce. Toutefois, il comporte des effets positifs tenant notamment à l’amélioration de l’offre commerciale dans une zone connaissant une progression démographique sensible, avec le maintien d’un supermarché de la même enseigne en centre-ville, à l’implantation du projet sur un pôle de développement urbain, destiné à accueillir des équipements commerciaux culturels et sociaux et à la stimulation de la concurrence entre enseignes de la grande distribution.

Art. 6 CEDH – concurrence entre enseignes – station-service

Conseil d’Etat 9 juin 2008- FÉDÉRATION JURASSIENNE DU COMMERCE et autres

Confirmation de la légalité de deux décisions du 11 juillet 2006 par laquelle la CNEC a accordé à la SA « Anciens Etablissements Georges Schiever et fils » l’autorisation de créer, d’une part, un supermarché « ATAC » d’une surface de vente de 1 200 m² et, d’autre part, une station de distribution de carburants de 113 m² dotée de 5 positions de ravitaillement annexée à ce supermarché, à Lavans-Lès-Saint-Claude (Jura)

L’annulation, par une décision du 25 janvier 2006 du Conseil d’Etat statuant au contentieux, des autorisations accordées le 13 janvier 2005 par la commission nationale d’équipement commerciale en vue de la création d’un supermarché d’une surface de vente de 1 200 m², d’un magasin spécialisé en bricolagejardinage, électroménager et audiovisuel d’une surface de vente de 2 000 m², ainsi que d’une station de distribution de carburants de 113 m² avec cinq postes de ravitaillement, a eu pour effet de ressaisir la commission nationale des demandes d’autorisations présentées par la S.A. « Anciens Etablissements Georges Schiever et fils ».

Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne peuvent être utilement invoqués, la décision attaquée n’émanant ni d’une juridiction, ni d’un tribunal au sens de ces stipulations. Saisie de trois demandes du même pétitionnaire pour ouvrir sur un même site un magasin spécialisé en bricolage-jardinage de 2 000 m², un supermarché d’une surface de vente de 1 200 m² et une station de distribution de carburants de cinq postes de ravitaillement attenante à ce supermarché, la commission nationale qui a statué, par trois décisions distinctes, sur chacune de ces demandes, en se fondant sur une même zone de chalandise correspondant à un temps de trajet de 25 minutes en voiture, n’a commis ni erreur de droit ni erreur d’appréciation.

Après réalisation du projet autorisé par la commission nationale d’équipement commercial, la densité commerciale dans la distribution à dominante alimentaire serait, dans la zone de chalandise, supérieure à la moyenne nationale mais inférieure à la moyenne départementale de référence. En outre, l’évolution démographique dans cette zone est positive et l’implantation de ces nouveaux équipements permettra de limiter l’évasion commerciale vers les agglomérations de Saint-Claude et d’Oyonnax, et de stimuler la concurrence entre enseignes. Dans ces conditions, le projet de supermarché contesté n’est pas de nature à affecter l’équilibre entre les différentes formes de commerce. Les requérantes ayant invoqué à l’appui de leurs conclusions dirigées contre l’autorisation  délivrée en vue de l’exploitation de la station-service les mêmes moyens que ceux dirigés contre la décision du même jour d’autorisation du supermarché, il y a lieu, pour les mêmes motifs, de rejeter ces conclusions.