La commission départementale d’aménagement commercial en questions

A compter du 1er janvier 2009, les CDAC remplacent les CDEC.

Tout en maintenant une autorisation d’exploitation, la LME (Loi de Modernisation de l’Economie du 4 août 2008) supprime toute référence à des critères économiques au profit de ceux liés à l’aménagement du territoire et au développement durable, pour répondre aux exigences européennes ; les instances décisionnelles locales sont également revues. La délivrance du permis de construire reste suspendue à celle de cette autorisation.

Mais cette réforme n’est qu’une première étape. Le gouvernement présentera, dans les deux ans, au Parlement un nouveau projet qui intégrera la législation de l’aménagement commercial dans le droit commun de l’urbanisme ; l’autorisation spéciale d’exploitation pourrait être supprimée et le commerce serait alors régulé en amont dans les documents d’urbanisme locaux. Le projet de loi Grenelle 2 devrait déjà enrichir certains de ces documents en matière de commerce pour traduire plus concrètement certaines dispositions de la loi LME.

Quelle est sa composition ?

Les CDEC comprenaient, à parité, trois élus locaux et trois représentants sociaux-professionnels. Cette composition est remaniée (article L 751-2 du Code de commerce) ; le nombre des membres est porté à 8, ainsi répartis :

  • 5 élus locaux :

          o le maire de la commune d’implantation,
          o le président de l’intercommunalité dont est membre la commune d’implantation, ou à défaut, le conseiller général du canton d’implantation,
          o le maire de la commune la plus peuplée de l’arrondissement autre que celle d’implantation,
          o le président du Conseil général ou son représentant,
          o le président du syndicat mixte ou de l’établissement public de coopération intercommunale chargé du SCOT auquel adhère la commune d’implantation ou son représentant ou, à défaut, un adjoint au maire de la commune d’implantation.

 En cas de cumul de mandats, le préfet désigne alors d’autres maires des communes situées dans la zone de chalandise.

  • 3 personnalités qualifiées en matière de consommation, de développement durable et d’aménagement du territoire. Lorsque la Commission siège au titre d’un projet cinématographique, une de ces personnalités relève de ce domaine.

      Comme auparavant, aucun membre ne peut délibérer dans une affaire dans laquelle il a un intérêt personnel ou s’il représente ou a représenté une ou des parties ; l’obligation de déclaration au préfet des intérêts détenus et de la fonction exercée dans une activité économique est maintenue.
      La loi valide, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les autorisations délivrées jusqu’au 1er janvier 2009, en tant qu’elles seraient contestées sur le moyen du caractère non nominatif de l’arrêté préfectoral fixant la composition des CDEC.

Quelles opérations y sont assujetties ?

  • Le seuil d’assujettissement est de 1 000 m² de surface de vente en création ou extension.

Pour atténuer les effets de cette importante augmentation du seuil, le Parlement a ouvert la faculté aux maires ou aux présidents d’intercommunalité, dans les communes de moins de 20 000 habitants, de proposer, au Conseil municipal ou à l’organe délibérant de l’intercommunalité de saisir, à l’occasion de l’instruction du permis de construire, la CDAC pour avis sur des projets compris entre 300 et 1000 m2. Lorsqu’il existe un établissement public de coopération intercommunale chargé du SCOT, le maire ou le président de l’intercommunalité notifie, dans les 8 jours, la demande de permis à son président qui peut alors proposer à l’organe délibérant de cet établissement de saisir la CDAC.

  • Les changements de secteurs d’activité sont visés au delà d’un seuil de 2 000 m² (1 000 m² pour les projets à dominante alimentaire).
  • La réouverture au public d’une surface de vente de plus de 1 000 m² après une fermeture de 3 ans et plus, est soumise à autorisation.
  • Les équipements cinématographiques de plusieurs salles et de plus de 300 fauteuils sont soumis à autorisation préalable.
  • Les équipements hôteliers, les stations services annexes à un commerce, les commerces automobiles et de motocycles ne sont plus soumis à autorisation.
  • Les magasins dans les gares ferroviaires situées en centre-ville, sont exemptés jusqu’à 2 500 m² de même que les regroupements de surface de magasins voisins sauf si l’activité nouvelle est à dominante alimentaire auquel cas le seuil est à 1 000 m².

Quels sont les critères décisionnels ?

Les CDAC examineront les projets en fonction des effets de ce dernier :

  • en matière d’aménagement du territoire :

          o l’animation de la vie urbaine, rurale et de montagne,
          o les flux de transport,
          o les effets sur les Opérations Programmées d’Amélioration de l’Habitat et les ZAC.

  • en matière de développement durable :

          o la qualité environnementale du projet,
          o son insertion dans les réseaux de transports collectifs.

Les SCOT peuvent définir des zones d’aménagement commercial, en considération des exigences de l’aménagement du territoire, de la protection de l’environnement ou de la qualité de l’urbanisme spécifiques à certaines parties du territoire couvert par le SCOT, à l’exclusion de critères économiques (analyse de l’offre commerciale existante ou impact de nouveaux projets). La définition de ces zones figure dans un document d’aménagement commercial intégré au SCOT par délibération de l’intercommunalité. Sous peine de caducité, il doit être soumis à enquête publique dans le délai d’un an de son adoption.

En l’absence de SCOT, l’intercommunalité compétente peut adopter avant le 1er juillet 2009 un tel document à titre provisoire, il est valable deux ans et devient définitif à la date d’approbation du SCOT.

Les documents d’urbanisme (SCOT et PLU) pourront, plus généralement, prévoir les conditions permettant d’assurer la diversité commerciale et la préservation des commerces de détail et de proximité. Le diagnostic urbain des PLU comportera un volet sur le commerce et leur règlement pourra identifier et délimiter les quartiers, îlots, voies dans lesquels doit être préservée ou développée la diversité commerciale, notamment à travers les commerces de détail et de proximité, et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer cet objectif.

Le parlement a finalement rétabli les ODEC (nouvel article L 751-9) en les chargeant de collecter les éléments nécessaires à la connaissance du territoire en matière commerciale et de mettre ces données à la disposition des collectivités locales et de leurs groupements qui élaborent un schéma de développement commercial.
Quel est le processus décisionnel ?

  • L’instruction des demandes d’autorisation

Les services déconcentrés de l’État restent chargés de l’instruction des demandes. Compte tenu de la suppression de l’étude d’impact économique, les observations des chambres consulaires n’ont plus d’objet.
Bien que la nouvelle loi doive entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2009, aucun projet inférieur au seuil de 1 000 m2 ne sera plus soumis aux actuelles CDEC et CNEC à compter de sa publication.

Les amendements visant à instaurer une consultation préalable des chambres consulaires lors de l’instruction des dossiers de CDAC n’ont pas été retenus. La loi prévoit seulement que pour éclairer sa décision, la CDAC entende toute personne dont l’avis présente un intérêt.

  • Le vote et la décision de la CDAC

La CDAC autorise les projets à la majorité absolue des membres présents. Le vote reste nominatif.
Les membres ont connaissance des demandes au moins 10 jours (au lieu d’un mois) avant de statuer.
La CDAC dispose d’un délai de deux mois (au lieu de quatre) pour se prononcer, son silence valant décision favorable. La décision est notifiée au maire et au pétitionnaire dans les 10 jours et, le cas échéant, au médiateur du cinéma.

Les projets restent autorisés dans leur totalité par mètre carré ou fauteuil.

  • Le recours devant la CNAC

Le recours en CNAC peut être formulé dans un délai d’un mois (au lieu de deux) à compter de la décision départementale par ” toute personne ayant un intérêt à agir ” ; il devient un préalable obligatoire à tout recours contentieux, sous peine d’irrecevabilité de ce dernier. L’intérêt à agir est légalement reconnu au préfet, au maire de la commune d’implantation, au président de l’intercommunalité membre de la CDAC, au président de l’établissement intercommunal chargé du SCOT ou du syndicat mixte et au médiateur du cinéma pour les projets correspondants. Il n’est donc plus possible de saisir directement les tribunaux. La CNAC se prononce dans le délai inchangé de quatre mois, son président a toujours voix prépondérante en cas de partage égal des votes.
Un tel dispositif de saisine préalable obligatoire de la CNAC pour tout requérant risque d’avoir des effets pervers en pratique. Les recours peuvent avoir tendance à se multiplier, car eu égard aux nouveaux critères d’aménagement et de développement durable, la notion d’intérêt à agir sera difficile à limiter (par analogie, le juge administratif ouvre largement le contentieux de droit commun en ces domaines). La CNAC pourrait donc être rapidement confrontée à un afflux de recours. Certes, en cas de silence de la Commission nationale pendant un délai de quatre mois, la requête est réputée rejetée et la décision de la Commission départementale validée, mais cela ne saurait être une solution satisfaisante, la voie de recours légale devenant alors vaine. De surcroît, les décisions expresses ou tacites de la CNAC sont contestées directement devant le Conseil d’État qui risque d’être vite saturé.

Quelles est la composition de la CNAC ?

La Commission nationale d’aménagement commercial comprend huit membres nommés, pour une durée de six ans non renouvelable, par décret pris sur le rapport du ministre chargé du commerce. La commission est renouvelée par moitié tous les trois ans.
La Commission nationale d’aménagement commercial se compose de :

   1. Un membre du Conseil d’Etat désigné par le vice-président du Conseil d’Etat, président ;
   2. Un membre de la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes ;
   3. Un membre de l’inspection générale des finances désigné par le chef de ce service ;
   4. Un membre du corps des inspecteurs généraux de l’équipement désigné par le vice-président du Conseil général des ponts et chaussées ;
   5. Quatre personnalités désignées pour leur compétence en matière de distribution, de consommation, d’urbanisme, de développement durable, d’aménagement du territoire ou d’emploi à raison d’une par le président de l’Assemblée nationale, une par le président du Sénat, une par le ministre chargé du commerce et une par le ministre chargé de l’urbanisme et de l’environnement.

Lorsque la commission nationale est saisie de recours contre les décisions des commissions départementales statuant sur les projets d’aménagement cinématographique, le membre mentionné au 4° du I est remplacé par un membre du corps des inspecteurs généraux du ministère chargé de la culture ; celle des personnalités mentionnée au 5° du I, désignée par le ministre chargé du commerce, est remplacée par une personnalité compétente en matière de distribution cinématographique désignée par le ministre chargé de la culture. En outre, la commission est complétée par le président du comité consultatif de la diffusion cinématographique.
Rapport J.-P. Charié, Avec le commerce mieux vivre ensemble (20 mars 2009)

Jean-Paul Charié (député du Loiret) a présenté le 20 mars 2009 un rapport sur l’urbanisme commercial, complété par une proposition de loi, qui devrait être prête d’ici le mois de juillet et dont l’adoption est espérée pour la fin de l’année.

Les principaux axes sont les suivants :

    * suppression du critère de la surface de vente au profit de ” 4 niveaux d’envergure ” (commerces de proximité, d’agglomération, départementaux, régionaux ou nationaux) (art. 2)
    * création de commissions départementales d’urbanisme commercial chargées d’élaborer les documents d’aménagement commercial (DAC). Ces commissions pourront être interdépartementales (région parisienne), composées d’élus locaux, de représentants d’acteurs économiques, de consommateurs et d’experts. La durée de validité du DAC sera calée sur celle du mandat municipal (six ans) (art. 3)
    * intégration d’un volet commercial aux documents d’urbanisme opposables (PLU, SCOT) aux permis de construire des activités commerciales (art. 6)
    * soumission à permis de construire ou déclaration préalable des travaux destinés à créer, élargir, ou à modifier une activité commerciale (art. 7)
    * abrogation de la loi “Royer” du 27 décembre 1973 et du titre V du livre VII du Code de commerce au plus tard deux ans après la publication de la loi sur l’ensemble du territoire national, ou préalablement, par territoire concerné dès la mise en conformité des PLU avec le DAC, ou, pour les permis de construire des activités commerciales de niveaux 3 et 4 d’envergure, dès l’approbation du DAC. Ce point lié à la période transitoire est à valider (art. 10)
    * création d’une commission nationale de recours, compétente pour instruire et juger les recours formés à l’encontre de permis de construire d’activités commerciales de niveaux 3 et 4 d’envergure.

Administrations et urbanisme commercial

Aussi la loi met-elle en exergue, parmi les critères devant être pris en compte par les Commissions départementales d’aménagement commercial (CDAC), les considérations de densité commerciale et d’effets potentiels sur l’appareil commercial ainsi que sur l’équilibre souhaitable entre les différentes formes de commerce.

Les interactions entre développement commercial et aménagement des territoires sont, bien que structurantes, insuffisamment connues des services publics.

Les commerces constituent un élément essentiel de l’urbanisme dont la finalité est d’optimiser sur les territoires les conditions de l’habitat, des transports, de l’emploi et des services tant commerciaux et artisanaux qu’administratifs. La fonction commerciale est d’ailleurs historiquement, avec le besoin de sécurité, à l’origine de la création et du développement des villes. Inversement le départ des commerces vers la périphérie et la disparition du petit commerce dans les bourgs ruraux affectent l’animation de la vie urbaine et rurale et sont de nature à provoquer le dépérissement des centres villes ainsi d’ailleurs que des zones urbaines sensibles (définies par la loi du 14 novembre 1996 sur la politique de la ville comme les grands ensembles et quartiers d’habitants dégradés confrontés à un déséquilibre accentué entre l’habitat et l’emploi).

C’est pourquoi la loi Raffarin de 1996 a complété la loi Royer en mettant également l’accent sur la nécessité de répondre aux exigences de l’aménagement du territoire, de la qualité de l’urbanisme et de la protection de l’environnement, et de prendre aussi en compte les effets des projets commerciaux sur l’équilibre des agglomérations et notamment sur les centres villes et les zones de dynamisation urbaine.

Pour autant, force est de reconnaître que les interactions complexes entre les implantations commerciales et l’aménagement urbain ont été peu étudiées et sont, dans l’ensemble, assez mal connues.

Les transformations de l’armature commerciale, et leurs implications sociales et spatiales, ont été insuffisamment analysées, sauf dans certaines grandes agglomérations dotées de moyens d’études (agence d’urbanisme). De même les effets induits sur la circulation des biens et des personnes, la consommation d’espaces rural et naturel, l’équilibre et l’évolution des quartiers et des paysages, sont mal appréhendés..